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Screatus Screatus

29 mars 2009

Note d'intentions

Note d’intention de mise en scène :

Sallinger.

Difficile d’évoquer, en quelques mots seulement, cette pièce aux décors-personnages-temps multiples et continuellement changeants.

Peut-être commencer par la figure du Rouquin : le disparu, le suicidé. Une famille qui le regrette : père, mère, frère, sœur. Et une veuve qui reste sous la pluie, assise sur la tombe de son mari.

Un rouquin disparu mais étonnamment présent sur scène,  à travers l’œil de Leslie, qui regrette son frère, fantasme sans cesse son retour jusqu’à le faire apparaître. Mais le mort disparaît ou fuit toujours trop tôt.

La famille et la veuve veulent comprendre POURQUOI

Et nous aussi voulons comprendre pourquoi, mais pas seulement pourquoi, aussi : quand, où, comment…

« Rien que pour vous emmerder » Répond le Rouquin à Leslie.

« On a trop souvent tendance, lorsqu’on vous raconte une histoire, à poser la question pourquoi, alors que je pense que la seule question à se poser est la question comment….Ainsi, en ce qui concerne Koch, je pose le fait qu’il veut se suicider comme une hypothèse préalable et lui même est fort agacé quand on lui en demande la raison. » Nous répond Koltès dans « Un hangar à l’ouest », in Roberto Zucco.

Au commencement du travail, la pièce nous enchante. Atmosphère étrange, un peu farfelue, drôle souvent, au delà et avec les thèmes premiers : suicide, regrets, ressassement des évènements passés…

Mais que dit Sallinger ? Qui sont ces personnages toujours changeants ? Où sommes nous ?

Sur le papier, des changements de décor à n’en plus finir : des ponts, des cimetières, un salon.

Des hallucinations lorsque Leslie passe du salon à un champ de bataille.

Une chronologie embrouillée.

Un mort et des vivants

Des morts vivants

Depuis combien de temps les personnages ressassent ils donc l’absence du rouquin dans leur salon poussiéreux ? Un mois, deux ? Des années ? Et les questions se multiplient.

***

Peut-être faudrait il revenir aux origines du texte ?

Cette pièce de jeunesse de Bernard Marie Koltès se présente comme une « adaptation » très libre de l’Attrape-cœur de J.D Salinger (sorte d’errance à la première personne de Holden, qui, renvoyé de son pensionnat, n’ose pas rentrer chez lui. Déambulation d’un adolescent dans les rues de New York) 

La lecture ou relecture de l’Attrape cœur de Salinger nous aide à mieux cerner le texte avant même que nous ne commencions à travailler plus sérieusement les scènes. La parole de Holden se retrouve dispersée entre les différents personnages : Leslie semble être le principal porte parole de la voix d’Holden, mais le Rouquin et Henry empruntent eux aussi les mots de l’adolescent ou ceux d’autres personnages du roman.

Mais

Si nous voyons plus clair dans la spirale du texte, qu’en sera-t-il du spectateur qui n’aura pas forcément lu le roman, ni la pièce et qui se retrouvera confronté pour une heure trente à un temps brouillé, des personnages changeants, une narration déconstruite ?

Une partie de notre travail devra résider dans la mise en place d’indices, de clefs de compréhension. Non pour lui imposer un sens, mais pour le guider dans une réception de signes. Il sera ensuite libre de reconstituer à sa manière le spectacle. Que les intuitions et les sensations du spectateur soient toujours en mouvement, au delà de la logique.

Le fait que cette mise en scène soit construite et réfléchie à deux d’abord, et à plusieurs ensuite , grâce à l’interprétation et la compréhension que les comédiens ont de leurs personnages, désengage en effet la pièce d’un seul point de vue, directif et pré-mâché.

Mais

Au delà de la nécessité ou non d’une lecture de l’Attrape-cœur pour comprendre Sallinger, se pose la question de la théâtralité même du texte et de sa structure.

Pièce aux nombreuses didascalies qui tirent la pièce vers le roman ou le synopsis cinématographique, pièce aux longs monologues, aux lieux sans cesse changeants…

«  Sallinger était un morceau de littérature dont parle un comédien » écrit Koltès.

Pourquoi porter sur les planches cette pièce qui se suffirait peut-être à sa simple lecture ?

Parce qu’il est trop tard et que nous sommes pris dans cette pièce malgré ses difficultés ? Que nous ne pouvons plus faire marche arrière ? 

Peut-être aussi parce qu’elle est, malgré ses origines littéraires, profondément voire démesurément théâtrale .

Théâtralité de la mort et place de la mort dans le théâtre.

Une grande part de la théâtralité du texte repose sur la réapparition du Rouquin et sur la présence de la mort sur scène.

Le Rouquin, double du frère mort, Allie, dans l’Attrape cœur : Allie à qui Holden parle dans sa fièvre et ses fantasmes.  Le rouquin apparaissant dans l’immense fantasme de Leslie qui dirige toute la pièce.

Le théâtre permet ici (au contraire de l’Attrape cœur) de concrétiser le retour du mort, le fantasme en chair et en os. Le théâtre n’est il pas le seul endroit où les morts peuvent apparaître ?

L’acteur n’est il d’ailleurs pas à la fois un corps vivant sur des planches et l’incarnation d’une ombre.

En portant sur les planches Sallinger , nous interrogeons l’essence même du théâtre : saisir et faire percevoir l’impalpable. Interrogation portée sur scène de façon récurrente.

Longue liste de revenants dans nos traditions théâtrales, Hamlet…

Mais le Rouquin est un drôle de revenant et Koltès joue ici avec les conventions théâtrales, au delà de la construction formelle de la pièce (didascalies à rallonge et monologues romanesques).

Dans les conventions, le revenant est habituellement mal-enterré, ne trouve pas de repos et revient régler ses comptes. Gâcher le présent des vivants qui, finalement, pourraient très bien vivre sans lui.

Ici, le Rouquin resterait bien où il est. Il n’a pas été assassiné par un père ou une mère, il n’a pas été découpé en morceaux, il est parti comme bon lui semblait et ne compte pas particulièrement revenir. C’est sans compter sur les personnages de la pièce qui vivent dans son souvenir, le rappellent sans cesse. La veuve se colle à sa tombe, la famille s’empoussière sur place autour de son souvenir…

Drôle de revenant en ce qu’ il est profondément insupportable et bien plus vivant que les autres personnages, insatisfaits de leurs vies.

Pour un théâtre spectral où les fantômes se prennent les pieds dans leurs draps.

Résumé a priori sombre : ressassement d’une disparition, famille poussiéreuse aux confins de la folie. Mais au delà de la douleur de l’absence, le spectateur se retrouve surtout face à une réapparition spectrale, déjantée et saugrenue.

Sans occulter la dimension tragique de la pièce, nous avons voulu renforcer le caractère dérisoire et décalé présent dans Sallinger.

Travailler la mort et la poussière sur le corps des membres de la famille, qui déambulent dans un espace clos, parlent pour eux même. La parole parfois forte ou très basse, les gestes soudain hystériques, accentués, ou faiblement répétitifs.

Travailler la vie dans le corps du Rouquin, presque toujours sur scène, et construisant l’espace ; mettre en valeur ses acrobaties.

Jouer sur l’illusion théâtrale alors que le thème de l’apparence est sans cesse décliné. Normalité, anormalité, bonne figure en société..

Faire se frotter la grande et la petite folie, l’hystérie et le rire, l’enfermement et la fuite sur l’espace scénique.

Et que devient le spectateur assis sur sa chaise?

Le spectateur est l’invité de marque d’une sorte de fête théâtrale dans lequel il sera tour à tour, ou parallèlement, spectateur, acteur, voyeur, toujours entre l’intérieur et l’extérieur. Observer une scène de famille par le trou d’une serrure, être directement interpellé par un personnage et pénétrer son espace mental, regarder un spectacle avec les autres personnages lorsque le frère et la sœur se mettent à danser, à faire des marionnettes, lorsque la mère raconte une histoire…Pièce théâtrale au delà de son côté spectral car les personnages ne cessent de jouer la comédie. Pour les spectateurs, leurs proches, eux même.

Fête théâtrale où tout se mêle. Au bord du gouffre, du vide, et de l’absurde sur un air de comptine. Réaliser l’alchimie du sinistre et du ludique.

 

« J’aime bien les ballades, à condition que, sur une musique gaie, le sujet soit très triste, ou qu’il soit joyeux sur une musique sinistre ». Shakespeare, Le Conte d’hiver.

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29 mars 2009

Le Rouquin, en pleine lecture

Ou Du non savoir du texte

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29 mars 2009

Carole

Blanche comme la pleine lune, avec au centre, le petit cercle noir de ses lèvres

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29 mars 2009

Le Conte de la mère

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29 mars 2009

La troupe du Screatus Théâtre en Création

La troupe du Screatus est actuellement en cours de création. Depuis Décembre, elle travaille sur la pièce de Bernard-Marie Koltès : Sallinger

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29 mars 2009

Le crachat est

"Le crachat est enfin, par son inconsistance, ses contours indéfinis, l'imprécision relative de sa couleur, de son humidité, le symbole même de l'informe, de l'invérifiable, du non-hiérarchisé, pierre d'achoppement molle et gluante qui fait tomber, mieux qu'un quelconque caillou, toutes les démarches de celui qui s'imagine l'être humain comme étant quelque chose, autre chose qu'un animal chauve et sans muscle, le crachat d'un démiurge en délire riant aux éclats d'avoir expéctoré cette larve vaniteuse"

Michel Leiris

29 mars 2009

La troupe du Screatus Théâtre

Le Screatus Théâtre a été fondé par Marine Lelong et Fanny Garin, en l'an 2008 après Jésus Christ.

Sont venus à elles, ou ont été traînés à elles,

Léonard Castelli (comédien)

Hayet Chouachi (comédienne)

Youen Chéné (comédien, scénographe)

Gilda Gamanossi (comédienne)

Clovis Guérin (comédien)

Justine Liard (comédienne)

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Screatus Screatus
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